IRP Brésil : Anthropocène, métropolisation et sociétés : prismes franco-brésiliens (Lyon, São Paulo)

Coordination :

Fabrice Bardet, UMR CNRS 5600 Environnement, ville, société, Ecole Nationale des Travaux Publics d’Etat

Lucia Shimbo, Laboratoire Yby (Grupo de Estudos Fundiários, Políticas Urbanas, Produção do Espaço e da Paisagem, Universidade de São Paulo- Instituto de Arquitetura e Urbanismo)

Les valeurs des territoires

L’IRP « Anthropocène » étudie le bouleversement provoqué par le nouveau contexte écologique planétaire sur les sociétés contemporaines en particulier caractérisées par une urbanisation devenue majoritaire au XXIe siècle. Dans ce contexte, il s’agit de s’intéresser aux nouveaux modes d’habitation de la planète, ou aux nouveaux espoirs et projets les concernant.

Pour rassembler les recherches conduites dans le cadre de l’IRP, il a été retenu le fil conducteur de l’envahissement des sociétés contemporaines par les dispositifs d’évaluation économique de la valeur des biens, des services ou des activités, toujours plus individualisés et orientés vers des calculs « en temps réel ». Un envahissement qui, selon la formule d’Alain Supiot, aurait installé une « gouvernance par les nombres » à la place de l’historique gouvernement par la loi, associé à l’avènement du modèle démocratique. Les évaluations économiques et financières ciblées et instantanées remplaceraient ainsi aujourd’hui la délibération collective qui visait à l’établissement de principes généraux de vie en société.

Le présent IRP propose de soumettre cette hypothèse à l’étude des modes d’habitation de la planète à l’heure anthropocène. En première instance, il s’agit de s’intéresser aux processus de fixation de la valeur des territoires ou des projets d’aménagement qui les concernent, selon trois axes qui envisagent classiquement l’économique, le social et l’environnement.

Sur le premier, il s’agit de s’intéresser à la manière dont les processus dits de financiarisation du monde ont transformé la fabrique des villes. Les biens immobiliers sont devenus des actifs valorisés sur les marchés financiers mondiaux. Les investisseurs et les services financiers liés aux marchés immobiliers se multiplient. Comment les acteurs locaux de l’aménagement se positionnent-ils dans ce contexte nouveau et quelles capacités de pilotage conservent-ils face aux mastodontes financiers qui les sollicitent ?

Face à la valeur marchande des territoires et des biens immobiliers, leurs valeurs d’usage sont classiquement très différentes. Une réflexion aujourd’hui relancée avec le succès de la notion de « communs » qui pourra être largement mobilisée. La valeur, souvent non chiffrée, que les populations prêtent à leurs habitats ou territoires de vie, trouve-t-elle une place dans les politiques d’aménagement qui visent les villes ou les campagnes ? Comment la valorisation des territoires issue des expériences habitantes sont-elles défendues à l’échelle des collectivités locales ? Quels acteurs associatifs ou politiques les portent ? Quelles évolutions dans les rapports de forces entre ces intérêts contradictoires sont-elles observées ?

Sur l’axe environnemental, les évaluations scientifiques se sont multipliées ces dernières années, pour le coup très précises et chiffrées. Mais les évaluations environnementales sont-elles véritablement prises en compte par les gestionnaires urbains ? C’est l’un des enjeux principaux de l’IRP que de replacer ces démarches scientifiques dans leurs contextes territoriaux et politiques qui souvent les privent d’une véritable reconnaissance.

A travers le prisme des processus d’évaluation des territoires, explicites ou implicites, et quelles que soient les formes de ces évaluations (scientifiques, habitantes, citoyennes, ou gestionnaires), l’IRP offre une perspective originale et transversale sur les nouveaux modes d’habitation individuelle et collective de la planète, à l’heure de la bascule anthropocène.

Pour développer son programme, l’IRP s’appuie sur la participation de deux grandes communautés de recherche aux profils académiques et aux traditions souvent distinctes : d’une part celle qui anime le champ des sciences sociales, et de l’autre celle du champ des sciences de l’environnement. Au-delà de l’enjeu scientifique exposé, l’IRP poursuit donc un enjeu épistémologique lié au croisement thématique et méthodologique de ces deux champs scientifiques.

Ce croisement disciplinaire multiple est directement mis au service de l’autre croisement au principe de tout IRP : celui des regards de deux communautés scientifiques nationales, en l’occurrence les communautés brésiliennes et françaises.

 

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