Séminaire : Gestion et conservation en contexte (post)colonial : Mises en récit et mises en œuvre

Atelier Faire territoire, faire société
Vendredi 21 janvier 2022 ,14h-17h , salle 604, 18 rue Chevreul, 69007 Lyon

Séance organisée par Dominique Chevalier (Université Lyon 1-INSPE), François Duchêne (ENTPE) & Thomas Zanetti (Université Lyon3)

© Photo Congopresse, H. Goldstein, Archives africaines, Bruxelles, SPF Affaires étrangères.

Le vendredi 21 janvier 2021, de 14h à 17h, en salle 604 du 18, rue Chevreul, le séminaire de l’atelier Faire territoire, faire société, organise une séance intitulée “Gestion et conservation en contexte (post)colonial : mises en récit et mises en oeuvre.

Deux intervenantes présenteront leurs travaux

  • Violette Pouillard, “Fractures conservationnistes et mises en récit, Est du Congo, ca. 1920 à nos jours.”
  • Géraldine Sfez, “Circulation, camouflage et résistance : l’histoire du riz oryza glaberrima. À partir de l’œuvre Oryza (2021) de Kapwani Kiwanga.”

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Présentation des interventions 

Violette Pouillard, “Fractures conservationnistes et mises en récit, Est du Congo, ca. 1920 à nos jours.”

Violette Pouillard, Chargée de recherche CNRS, LARHRA, UMR 5190

Cette communication traitera des conflits socio-environnementaux associés aux modes de gouvernance conservationniste déployés par les autorités coloniales belges au Congo, qui sous-tendent et contribuent à expliquer nombre de tensions et conflictualités contemporaines autour de l’accès aux ressources environnementales. Alors que l’historiographie a mis en évidence l’exclusion coloniale des droits de terre et d’usage congolais, mais aussi des usages coloniaux, opérée à travers les dispositifs officiels de protection de la faune, ces derniers cristallisent et incarnent l’opposition entre la protection des animaux d’une part et les activités humaines et les intérêts économiques d’autre part.

Cette contribution présentera les résultats de travaux visant à porter attention tout à la fois aux dimensions sociale, environnementale et animale des politiques conservationnistes, en argumentant que cette perspective intégrée d’histoire par en bas représente un auxiliaire nécessaire à la déconstruction des discours (post)coloniaux sur la gouvernance environnementale. A travers des micro-histoires entrecroisées, la communication mettra l’accent sur les formes systémiques d’usage et de réification des animaux protégés opérées par l’appareil conservationniste lui-même, et sur les collaborations transculturelles et les fractures et oppositions associées. Les dislocations sociales du conservationnisme colonial s’associent ainsi à des perturbations environnementales et animales de large portée marginalisées par les sources et les récits.

Violette Pouillard est chargée de recherches du CNRS au LARHRA et professeure invitée à l’Université de Gand. Elle est l’auteure d’une monographie (Champ Vallon, 2019) et de plusieurs articles traitant des politiques coloniales de gestion et de protection de la faune.

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Géraldine Sfez, “Circulation, camouflage et résistance : l’histoire du riz oryza glaberrima. À partir de l’œuvre Oryza (2021) de Kapwani Kiwanga.”

Géraldine Sfez, Université de Lille, Centre d’étude des arts contemporains.

Il s’agira, à partir d’une analyse de la pièce de l’artiste franco-canadienne Kapwani Kiwanga, Oryza (2021) et plus largement de son exposition Cima, Cima (Le Crédac, Ivry, 2021), de retracer l’histoire de cette variété de riz Oryza glaberrima, originaire d’Afrique de l’Ouest et transporté dans leur chevelure par les femmes africaines réduites en esclavage. Dissimulés, puis cultivés en Amérique du Sud, notamment dans un contexte de marronnage, ces grains de riz témoignent de l’histoire de l’esclavage tout en renvoyant, dans le travail de Kapwani Kiwanga, à un geste de résistance et d’émancipation.

Comme dans ses œuvres Flowers for Africa (2017-2020) ou White Gold : Morogoro (2016), pièce monumentale réalisée en fibres de sisal, la pratique de Kiwanga Kapwani, anthropologue de formation, consiste ici à questionner l’histoire des plantes, ce que celles-ci révèlent de l’histoire coloniale et post-coloniale et de ses enjeux économiques et géopolitiques. À travers ces œuvres qui s’inscrivent dans ce qu’on appelle le « tournant végétal » de l’art, Kiwanga interroge ainsi le devenir-archive des plantes.

Géraldine Sfez, agrégée et docteure en Philosophie, est maîtresse de conférences en Études cinématographiques à l’Université de Lille et membre du CEAC (Centre d’Étude des Arts contemporains). Ses recherches portent sur l’esthétique et la théorie des arts visuels contemporains et s’articulent principalement autour des relations entre pratiques mémorielles et pratiques artistiques, cinéma et art contemporain. Depuis 2018, elle co-dirige la revue « Déméter. Théories et pratiques artistiques contemporaines ».